Treize ans pour le pédophile

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Treize ans pour le pédophile

Il avait proposé à la plupart de ses victimes, des garçons de 11 à 16 ans, de venir faire des travaux de maçonnerie dans sa maison du canton de Roulans.


BESANÇON. _ Si ce pédophile de 38 ans n'a écopé que de 13 ans de réclusion criminelle, alors que l'avocat général Gérard Nappey en avait requis 15, il le doit très probablement à sa mère.


Serait-elle venue devant les jurés pour implorer leur clémence ? Pas du tout. Celle qui a abandonné son enfant dès le berceau et a été déchue de ses droits parentaux clame haut et fort :


« Il faut qu'il soit puni !


Vous ne lui trouvez pas d'excuses ? demande la présidente Marie-Agnès Crédoz.


Aucune excuse ! »


Et pourtant, les excuses, elles sont nombreuses. On se perd dans les méandres incestueux de la famille. L'accusé raconte longuement son enfance, cette grand-mère qui le protégeait mais qui buvait beaucoup, les agressions sexuelles dont il a fait l'objet, les scènes de violence dont il fut le témoin. « Le fil rouge de votre existence, commente la présidente, ce sont les déviances ! » « Un vécu lourd, traumatique et complexe, précise la psychologue, Mme Calderone.... Quand un sujet a un vécu comme le sien, le développement psycho-affectif est complètement perturbé. » Outre les troubles de l'affect, elle a relevé une difficulté d'élaboration mentale (la personne se blinde contre tout sentiment) et une grosse problématique sexuelle orientée vers la pédophilie.


Angélique



« Les regrets ne suffisent pas pour faire changer son mode de fonctionnement, le travail de thérapie sera extrêmement long, douloureux et difficile, précise l'expert. Il faut qu'il accède à la souffrance, c'est un passage obligé. Le fera-t-il ? »


Homme d'autant plus dangereux qu'il possède un physique agréable de blond aux yeux clairs et un gentil sourire. Pas un des parents n'a imaginé, lorsqu'il proposait à leur gamin de faire un tour à vélo ou de venir lui donner un coup de main dans la réfection de sa maison, qu'il l'entraînerait devant son ordinateur pour consulter des sites pédophiles et qu'il passerait à l'acte un peu plus tard.


Certes, en ce qui concerne son demi-frère qu'il hébergeait ou ce petit cousin en vacances, c'était facile, la proie était à disposition.


Partie civile, Me Françoise Péquignot ne ménage pas l'accusé qui a profité de la fragilité et des problèmes que connaissait son client, un adolescent de seize ans, pour le violer. « Quoi qu'on ait vécu, lance-t-elle, on n'est pas obligé d'en arriver là ! »


Un avis partagé par Me Sibon, avocat d'une autre victime, celle qui a dénoncé les agissements de l'accusé, « le grain de sable dans la machine, sinon il aurait continué et il aurait agressé d'autres enfants, vos enfants ! »


Affaire de proximité



« Quatre victimes ont été identifiées mais il en a probablement capté d'autres dans ses filets », renchérit l'avocat général Gérard Nappey. « Nous savons tous que cela existe, mais ailleurs. Là, c'est une affaire de proximité qui s'est déroulée à quelques kilomètres de cette salle ! »


Malgré sa répugnance pour les faits, le magistrat ne veut montrer « ni haine, ni mépris, ni excès mais pas de faiblesse non plus. »


Il campe le pédophile, sa stratégie de séduction, sa façon d'utiliser des gamins fragiles, en quête d'amour. Et de requérir 15 ans de réclusion criminelle et un suivi judiciaire de 10 ans.


Reste à Me Dominique Carré, qui assure la défense de l'accusé, de montrer que cet homme n'est pas le monstre qu'on peut imaginer. « Je le connais depuis qu'il a six ans, souligne l'avocate, il était et il est resté un très gentil garçon... C'est la multiplication des traumatismes qui fait le pédophile et ce garçon n'a connu que ça, depuis sa plus tendre enfance. »


Une plaidoirie sensible dont les jurés ont tenu compte. Outre les treize ans de réclusion criminelle, ils ont ordonné un suivi judiciaire de 10 ans avec une peine de cinq ans ferme encourus en cas de non respect des obligations, à savoir se soigner, ne pas recevoir ou héberger des mineurs hors la présence de leurs parents.


Annette VIAL